Couleur Corail


Couleur Corail, roman de 236 pages, est paru en juin 2013 aux éditions du Cap Béar.

Le livre

Le point de vue de l'éditeur :

Pourquoi Paul, saisi d’un irrépressible désir, entreprend-il ce voyage en Sardaigne ? Cette île qu’il devait découvrir avec sa femme Lucile, morte quelques années plus tôt... Qu’est-il venu chercher ? Que trouvera-t-il ?
Voilà qu’un rameau de corail traverse les siècles et devient bijou. Il parcourt le temps et l’espace, d’une île méditerranéenne à une autre, reliant des êtres aux personnalités fortes.
Qu’il s’agisse de Milena, Andreas, Fabianus, Taniei ou Efisia, leurs destinées à la fois si proches et si éloignées vibrent de passions et de drames.
Leurs existences, au cours de l’Histoire, s’écrivent sur un même livre du Moyen Âge à nos jours, entre Sardaigne, Baléares et Catalogne, entre Collioure et Alghero où chacun aspire à revenir...
Aujourd’hui comme hier, la guerre, l’ambition, l’asservissement, la maladie et la mort, mais aussi l’amour, l’amitié, l’esprit de solidarité et de fraternité tissent la trame de la vie humaine.
La dimension romanesque de ces destins, servie par un style à la fois sensible et précis, ouvre une porte sur l’imaginaire qu’à votre tour vous franchirez…

Extraits



Extrait de

Chapitre 1 : août 1353

Dans la ville rien ne bouge en apparence, même les pierres semblent attendre. Les rues désertes s’étirent au loin ou s’enroulent autour des maisons serrées les unes contre les autres. Simples masures ou demeures bourgeoises, elles se taisent. Les portes et les volets clos enferment le silence. Les habitants terrés à l’intérieur se protègent de dangers invisibles comme ils se protègent des moiteurs de l’été. Un chat noir et blanc avance sans hâte et saute en souplesse d’un bord de toit à un autre, il darde ses prunelles dorées sur un unique passant qui ne l’a pas vu.
Nicola glisse tel une ombre, de ruelle en ruelle, jusqu’à atteindre la place nue, inondée d’un soleil cru, que borde la haute muraille. Par précautions, elle vient d’être renforcée et il s’en dégage une impression de solidité rassurante. Elle est si épaisse qu’on entend à peine le murmure de la mer paisible dont les vagues ondulantes viennent lécher les contreforts.
Levant les yeux vers le ciel blanc de chaleur, le garçon cherche un signe de vie, un froissement d’ailes. Mais rien ne trouble la torpeur du jour. Les oreilles aux aguets, il écoute. Les muscles tendus, il est prêt à bondir. Est-il le seul à percevoir cet imperceptible frémissement qui court de proche en proche, annonçant peut-être l’arrivée imminente de l’ennemi ? Grimpé au sommet de l’enceinte, il embrasse l’horizon d’un seul regard, là où l’eau disparaît dans le tremblement de la brume, là où la montagne s’abîme dans les flots bleutés, là où l’air frissonne sans bruit.



Extrait de

Chapitre 2 : juin 2003

Peu à peu, il parvient à s’abstraire de l’agitation moderne qui est parvenue à s’introduire jusqu’ici, il entend le silence, peut-être parce qu’il s’est engagé dans une ruelle étroite, sans boutiques. Il est passé à côté d’un vieux puits qu’il ne saurait dater mais qui lui rappelle qu’autrefois, à Alghero, les habitants puisaient de l’eau salée qu’ils utilisaient pour la cuisson de leur pain. Un bruit à peine perceptible lui fait soudain tourner la tête en arrière. Il croit avoir entendu comme un rire étouffé et il entrevoit une silhouette d’adolescent à l’étrange accoutrement. L’apparition s’est évanouie à l’angle d’une ruelle voisine. Paul reprend sa marche lente vers la mer, désireux de contempler le coucher du soleil sur ses eaux transparentes.
Est-il la proie d’une hallucination ? Voilà que surgit, devant lui cette fois, le même insolite personnage, vêtu à l’ancienne. Et il disparaît tout aussi vite que la première fois. Parvenu au bout de la ruelle, Paul ne voit personne. Un chat noir à la démarche majestueuse passe tout près, tournant vers lui ses prunelles énigmatiques, puis s’évanouit dans l’ombre.



Extrait de

Chapitre 3 : mars 1354

Toute étourdie, elle se retrouve jetée dans un enclos étroit, parmi d’autres femmes à peu près de son âge et souvent, comme elle, avec un enfançon dans les bras.
– Tu as fait là une belle prise ! s’exclame un garde avec un gros rire à l’adresse de celui qui vient d’amener Milena. – Je le pense, répond l’autre, l’air satisfait. On pourra tirer un bon prix de cette gueuse !
L’insulte du dernier mot giffle Milena. Horrifiée, elle se refuse à penser qu’elle sera vendue ! Ses compagnes ne la rassurent pas. Il en est même une qui, regardant tour à tour son petit et celui de la nouvelle arrivée, lui précise :
– Faudra s’estimer heureuses si on fait de nous des nourrices…
La jeune veuve ne peut retenir ses larmes. Elle a été arrachée à ses parents, elle a perdu son époux, elle ignore où sont ses frères à supposer qu’ils soient encore de ce monde, elle a tout perdu en si peu de temps et elle n’a pas vingt ans. De quelles fautes Dieu la punit-Il ?
Son fils sera désormais sa seule raison de vivre.



Extrait de

Chapitre 5 : décembre 1354

Soudain, on l’interpelle. En haut de la falaise, juste au-dessus de lui, des cavaliers l’observent et lui intiment l’ordre de s’arrêter. Il n’entend pas les mots mais il comprend le sens. Suivant le Cami dels Cavalls, des gardes sillonnent l’île de part en part. Montés sur leurs robustes chevaux noirs, ils sont chargés de contrôler les approches de Menorca, jamais à l’abri d’une incursion de pirates venus du nord de l’Afrique ou de Gênes. À l’occasion aussi, ils ne manquent pas de ramener les esclaves fugitifs qu’ils ont capturés. Et cet homme-là, en guenilles, barbu, chargé de sacs, a tout l’air d’en être un.
Andreas lâche toutes ses affaires et, tel un éclair, se met à courir. Les cavaliers le suivent, il entend résonner leurs sabots et rouler les cailloux. On lui lance des projectiles, il court à en perdre haleine. À ce moment, le ciel se déchire et le soleil envoie ses rayons matinaux sur la mer qui scintille. Le fugitif avise une sorte de promontoire. Sans réfléchir, il se précipite et les bras en croix, les jambes jointes il se jette dans le vide. Il aurait pu se fracasser sur des rochers mais la nappe tranquille l’accueille en son sein. Il descend, il se laisse faire, ses tempes bourdonnent mais qu’importe. Il glisse entre deux eaux, il est bien, il est libre.



Extrait de

Chapitre 6 : octobre 2003

– Voyez, il s’agit d’une pièce très originale en or plissé avec une branche de corail rouge incrustée.
Du bout du doigt, elle suit le dessin du rameau précieux et son ongle laqué semble assorti à sa teinte éclatante.
– Ce n’est pas une création moderne ? interroge Paul qui devine la réponse.
– Non, mais mon père qui est un artiste lui a donné une nouvelle vie. Voyez à cet endroit ce trou minuscule, il a été percé, sans doute pour faire passer la bélière. Maintenant, il repose dans un nid d’or.
La vendeuse parle avec conviction et Paul, séduit dès le premier regard, sait déjà qu’il va acquérir cet objet sans savoir ni pourquoi, ni pour qui. Il pense à Lucile, elle aimait porter les délicats pendants d’oreilles qu’il lui avait rapportés de Sicile, elle remuait la tête pour que dansent les perles rouge orangé… Il pense aussi à Efisia lui racontant que jadis, on cachait un bout de corail dans sa bourse comme talisman contre la sorcellerie ou, si l’on était marin, pour protéger son bateau de la foudre.



Extrait de

Chapitre 9 : février 1376

Alors un vent de panique accompagne le mot qui circule de ruelle en ruelle : « C’est la peste ! »
Le terrible fléau a déjà ravagé la ville quelque quarante ans auparavant. La communauté juive se souvient que lorsque les siens ont été épargnés par la maladie, beaucoup ont été précipités dans les puits que la population de S’Alighèra les accusait d’avoir empoisonnés.
L’affolement grandit. Certains fuient au plus vite, allant parfois jusqu’à abandonner père, mère ou enfant. Dieu les punit car, touchés quand même, ils sont à leur tour abandonnés. D’autres partent en famille, emportant l’épidémie dans leurs bagages et ils la répandent à une vitesse foudroyante.
Plusieurs notaires meurent pour s’être rendus chez des clients qui voulaient régler leurs affaires, ceux qui restent refusent de se déplacer pour rédiger un testament.
On ne trouve pas non plus de curé pour administrer les derniers sacrements, la plupart sont morts parmi les premiers et ceux qui ont échappé par miracle sont débordés. L’évêque a fait savoir que, vu les circonstances exceptionnelles, les mourants peuvent se confesser à n’importe quelle personne de leur entourage, même à une femme. Le bruit court qu’ainsi, ils assurent leur salut éternel.



Extrait de

Chapitre 10 : mai 2004

Dès que Paul évoque le brassage de peuples qu’a connu l’île depuis les Phéniciens jusqu’aux Piémontais en passant par les Vandales, les Byzantins, les Arabes, les Pisans, les Génois, les Catalans, les Aragonais, les…, il n’a pas le temps d’achever son énumération qu’il est brutalement interrompu par un tollé général : il n’a rien compris, ces envahisseurs n’ont rien à voir avec la nature profonde de l’âme sarde et c’est elle qu’il faut revitaliser, sauver coûte que coûte. Les Sardes n’ont besoin de personne pour s’assumer, leur terre peut les nourrir.
Paul croit déceler une forme de désespoir dans cette obsession du retour aux origines les plus lointaines sans tenir compte des apports successifs au cours des siècles. Comment nier les mélanges ? Et surtout comment ne pas penser que, malgré l’oppression, les violences subies, les autochtones et les « étrangers » venus de la mer se sont forcément assimilés mutuellement, s’enrichissant de ce qu’ils étaient ? Lequel de ces hommes et de ces femmes pourrait affirmer qu’aucun Byzantin, Arabe ou Espagnol ne figure parmi ses ancêtres ?
L’écrivain renonce à leur dire qu’il lui suffit de les regarder pour voir des visages différents de la Sardaigne mais qu’il les trouve tous beaux.

L'éditeur

Cap Béar Editions, une maison dynamique qui propose joliment à ses lecteurs de "s'offrir l'évasion des mots".

Pour visiter son site CLIQUEZ ICI

POUR SE PROCURER LE LIVRE

- chez votre libraire habituel, au prix de 15 euros ;

- ou en prenant contact avec l'éditeur Cap Béar Editions ;

- ou auprès de l'auteur, au prix de 19 euros (incluant les frais de port), si vous souhaitez une dédicace personnalisée.